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Et mes yeux clairvoyants comptent les grains de sable
Que roule dans Bon lit la mer intarissable
Et les feuilles des bois qui naissent au printemps.
Lorsqu’un homme gémit dans son cœur, je l’entends.


HERCULE


Apollon, le plus cher des dieux, je te salue !
Tu savais raffermir mon âme irrésolue
Lorsque je dus livrer mes plus rudes combats ;
Ta main pressait la mienne, et tu me parlais bas.
Souvent aussi Pallas augmenta ma vaillance ;
Et j’étais confiant dans mon arc et ma lance
Quand j’avais entendu sa voix tonner dans l’air,
Ou lorsqu’elle fondait sur moi comme l’éclair
Et que j’entrevoyais, plein d’une heureuse attente,
Son casque d’or, ses yeux et sa robe éclatante
Qui tournoyait autour de ses pieds immortels.
Ah ! ne me quittez point ! car mes maux furent tels
Que, pour les oublier, j’ai besoin que l’on m’aide.
Mais, radieux amis, savez-vous un remède
Contre les souvenirs qui font saigner le cœur ?
Mon esprit, ô divin Archer, perd sa vigueur.
Je ne suis plus Hercule ; et, le trouble dans l’âme,
Je m’apprête à gémir, dompté comme une femme…