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« Les êtres divisés, périssables, souffrants
Ne pourront pas atteindre à ma béatitude ;
Pourquoi troubleraient-ils la chaste solitude
Que peuplent, par milliers, mes songes fulgurants ? »

Il se tut. Mais la Terre, où bouillonnaient les choses,
Entonna fièrement un chant large et serein ;
Elle évoqua la vie et, d une voix d’airain,
Déroula le solide enchaînement des causes.

*


« Si tu m’aimes, voici l’avenir dévoilé.
J’enfanterai le Ciel au grand corps étoile,
Le robuste Ouranos, qui sur le monde à naître
Doit s’étendre à jamais comme un immense hêtre.
Pour produire les monts je me soulèverai.
Les forêts couvriront mon corps démesuré.
Je cracherai la mer furieuse qui fume.
Alors, me dépouillant de ma robe de brume,
Ouranos tout entier se couchera sur moi.
Par lui j’aurai des fils terribles et sans loi :
Les Cyclopes qui font tressaillir dans ses gorges
L’Etna resplendissant de la clarté des forges ;