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L’affaiblissement de ces croyances ne devint pas funeste à la morale qui en était issue on qu’elles revêtaient d’un caractère sacré, parce que l’âme humaine, une fois en possession d’une vérité, ne peut plus s’en dessaisir ; mais on eût tâtonné longtemps pour acquérir les premières notions du bien, que la religion rendit accessibles à tous. Chez les Aryas, par exemple, si l’on n’avait pas cru à une survivance mystérieuse des ancêtres, dont les mânes protégeaient la maison paternelle, à la vigilance et à la sainteté du feu domestique, à la transmission par la race d’une existence ininterrompue, patrimoine commun de toutes les générations d’une même famille, il est douteux que le père eût inspiré autant de respect, qu’une réprobation si forte eût frappé l’adultère, qu’on eût attaché un prix aussi grand à toutes les vertus privées. Les premiers contrats scrupuleusement observés furent sans doute ceux que l’on passait avec les dieux, leur promettant des offrandes en échange de leur protection ; et cela dut inspirer peu à peu le respect de la parole donnée, dont ces mêmes dieux furent institués les gardiens.

La morale, dans certaines conditions assez rares, put se développer d’une manière indépendante ; mais les hommes ne manquèrent jamais de placer sous la sauvegarde des Immortels le trésor sans cesse