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« Maigre ascète roulé dans un manteau fangeux,
Tu t’enfonceras, loin des rires et des jeux,
Comme un rhinocéros dans une solitude ;
Et tu te pencheras sur le Néant sacré
Avant de revenir vers les hommes, paré
De grâce et de mansuétude.

« O Çakya-Mouni, dans mon rêve je vois
L’arbre d’intelligence au fond d’un calme bois.
Sous le noble figuier tu médites, ô sage.
Te voici mûr enfin pour le suprême oubli ;
La splendeur d’un Bouddha désormais accompli
Rayonne sur ton beau visage.

« Transfiguré, vêtu d*éblouis3ants habits,
Sur un large lotus aux feuilles de rubis
Tu t’élèves dans l’air ; tout l’horizon rougeoie ;
Les Dévas font sonner leurs timbales d’airain…
Il a neigé des fleurs sur le Bouddha serein
Qui plane au-dessus de la joie.

« Maître des mondes, pur, céleste, rayonnant,
Quelle tentation te vaincra maintenant ?
Ta sais que tout languit, se décompose et change.
La voix des Apsâras ne trouble point ta chair ;
Et tu foules aux pieds les démons de l’enfer,
Plus nombreux que les flots du Gange.


V