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Brûlante de désir parmi les térébinthes,
Tu souillas nos amours légitimes et saintes.
Tu suivis l’étranger, multipliant tes pas,
Rieuse et chuchotant des paroles câlines.
Tu te prostituas sur toutes les collines
Avec des dieux qui n’en sont pas !

Afin de les parer, ce fut ta grande joie
De prodiguer l’argent, l’or, les tissus de soie.
Ton huile et tes parfums que je t’avais donnés
Coulèrent pour des dieux semblables à des bêtes ;
Oui, mon plus pur encens, la myrrhe de mes fêtes,
Tu les consumas sous leur nez !

Je ne déchaînais pas encore ma colère,
Et tu disais : « Voilà ! j’ai reçu mon salaire »
Lorsque j’avais rempli ta grange et ton cellier.
Mais soudain je changeai tes vignes en broussailles,
Moi, puisqu’il était loin, le temps des fiançailles,
Et que tu pouvais m’oublier !

Je te précipitai de ton orgueil de reine.
Devant tous tes amants je pris ta longue traîne
Et je la relevai par-dessus tes cheveux.
Tous, ils virent ta honte ; et, détournant ma face,
Je leur dis : « Prenez-la ! qu’elle vous satisfasse !
Car ce n’est pas moi qui la veux. »