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Puis ton sein délicat se gonfla davantage.
Quand le duvet qui vient aux filles de cet âge
Apparut sur ton corps, je t’engageai ma foi,
O chercheuse d’amour qui t’es mal souvenue !
Et, voulant t’épargner la honte d’être nue,
J’étendis mon manteau sur toi.

Tu fus à moi. J’aimais la beauté de tes joues.
Je te fis belle et riche, il faut que tu l’avoues !
Je te vêtis de lin, je parai ton turban ;
Je te nourris de miel et de fleur de farine ;
Ton souffle s’exhalait de ta jeune poitrine
Comme le parfum du Liban.

Je mis un diadème au front de l’épousée.
Avec le fin rubis et l’opale irisée
J’ornai tes noirs cheveux, ta gorge, tes bras nus ;
Je suspendis de clairs anneaux à tes narines…
Et toi, si j’entrouvrais tes robes purpurines,
Tu rêvais d’amants inconnus !

Regarde, au temps du rut, l’impudique chamelle.
Nous t’avons vue ardente et lascive comme elle,
Lorsqu’elle aspire l’air par ses larges naseaux.
Elle rôde affolée, et rien ne peut lui plaire.
Certes, c’est bien le, vent du mâle qu’elle flaire,
Et non pas la fraîcheur des eaux !