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VI

Pauvres couples saignants que l’âpre Amour attelle,
Quand, les yeux égarés et les lèvres en feu,
Vous croyez librement fuir vers le pays bleu,
La Nature aux yeux morts vous chasse devant elle.

Votre gorge halète et votre chair pantèle,
Sitôt qu’elle vous livre à l’implacable dieu ;
Mais elle n’a souci que d’accomplir son vœu
Et de rendre par vous une race immortelle.

Amants qu’elle a poussés dans ses rudes chemins,
Vous vous cherchez des yeux, des lèvres et des mains ;
L’âme reste pour l’âme un douloureux mystère.

Un jour vous êtes las de servir de jouet
A Celle qui poursuit un rêve solitaire,
Et vous vous séparez en hurlant sous le fouet.