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une phase plus religieuse, ont changé de caractère par l’exécution. Ainsi je n’ai guère insisté, dans La Terre et l’Amour, sur ce qui en fut le point de départ métaphysique ; j’y ai plutôt ébauché une synthèse des mythes grecs, interprétés dans un sens idéaliste. Le poème de source kabbalistique, Iakin et Boaz, révèle un esprit qui se détourne du Mystère divin plutôt qu’il ne s’y complait. Enfin, lorsque sous le voile de mythes interprétés avec plus ou moins de liberté (Adam et Ève, Hercule, Odin) je laisse entrevoir une pensée personnelle, c’est avant tout, sinon exclusivement, une pensée morale.

Il résulte des exemples précédents que, le Prologue mis à part, les sujets traités dans le premier volume des Symboles le furent à des points de vue assez divers. Je ne crois pas que ce soit un défaut. Il y a là une cause de variété ; et l’unité du livre n’en subsiste pas moins. Ce que la religion, envisagée sous toute sorte d’aspects, fut pour l’âme humaine, reste l’unique inspiration des Symboles. D’autre part, je n’ai pas à rechercher si mon livre, écrit dans la disposition mystique où j’étais en le commençant, eût été meilleur ou pire. Peut-être eût-il gagné en intensité de vie ; mais je crois que la pensée en eût été moins large et moins sérieuse. De toute manière, je ne pouvais l’écrire autrement que je n’ai fait, sans manquer à cette absolue sincérité qui est la première condition de toute œuvre d’art. Peu importe, d’ailleurs. J’ai voulu seulement, dans cette préface, montrer le désaccord qui existe entre la pensée initiale du livre, si l’on en juge d’après le Prologue, et le livre lui-même. Certains