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d’un grave silence, des basses caverneuses exposent un sujet de fugue : « Et la terre les engloutit. » J’engage ceux qui méprisent la scolastique à méditer les trois pages de ce chœur.

L’autre a les proportions d’une colossale architecture. Les instruments, par un rythme saccadé, préparent l’entrée des voix qui, l’une après l’autre, disent : « Les peuples entendront et ils seront effrayés. » Un subit abaissement des voix montre quelle terreur Israël a de son Dieu, à l’heure même où Jéhova fait tant de miracles pour le conduire au pays de miel et de lait où reposent les patriarches. « Ils seront pris d’épouvante ; le peuple de Canaan se fondra. » Voilà ce que la musique rend visible : l’évanouissement d’une race tout entière. Pendant que les huit voix du chœur semblent elles-mêmes stupéfaites de ce qu’elles annoncent, le staccato de la basse ne s’interrompt jamais : Moab tremble, Édom tressaille, Ismaël claque des dents, les visages sont éperdus, les genoux fléchissent, les mains se lèvent suppliantes. « Devant la force de ton bras ils seront muets comme la pierre. » Le chœur se développe avec une magnifique ampleur, une variété merveilleuse dans les com-