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ROBERT LOZÉ

— Veuillez, monsieur, dit-elle, l’appeler par le téléphone et lui demander de venir me rejoindre.

— Serait-il possible de transporter M. Gardner à Québec ?

— Le médecin me dit que nous pourrons le faire sans danger. Il est revenu de son évanouissement. Maintenant il repose et ne souffre pas. Mais il faudra une civière afin d’éviter les secousses. Il ne pourrait supporter le mouvement d’une voiture.

— Madame, dit Robert, si vous le voulez, je communiquerai avec M. de la Chenaye. Je lui demanderai de ne pas venir jusqu’à Lévis, mais de tout préparer de l’autre côté pour la réception du malade, et de nous attendre au débarcadère.

— Je vous remercie. Oh ! Que nous partions au plus tôt.

Robert revint au bout de quelques instants. Il s’était entendu avec M. de la Chenaye et ramenait deux hommes portant une civière sur laquelle le malade fut placé avec toutes les précautions possibles. Ils s’acheminèrent ainsi lentement vers le quai, la foule s’écartant pour leur donner passage.

Cette triste promenade fut plus longue qu’on ne l’avait supposé à cause de l’encombrement à la traverse. L’accident avait centuplé le trafic. Une partie considérable de la population de Québec se précipitait à Lévis, les uns par devoir, les autres poussés par l’inquiétude, le plus grand nombre pour satisfaire une curiosité morbide. De temps en temps on voyait passer des blessés sur des civières ou dans des voitures. On eût dit les derrières d’une armée après une bataille.

En attendant le bateau, la civière où gisait Gardner fut posée avec précaution sur des appuis, et Robert retiré à l’écart, eut le loisir d’examiner le groupe dont le hasard lui avait confié la garde. On voyait que Gardner devait être un homme de taille remarquable. Sa femme, debout près de lui et lui tenant la main, avait la tête et le galbe d’une