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ROBERT LOZÉ

trémités communiquant avec les vestibules étaient tellement enchevêtrées dans leurs cadres qu’il était impossible de les ouvrir. L’avocat se hissait déjà sur les épaules du nègre pour atteindre les croisées du haut et appeler au secours, lorsque des coups de hache l’avertirent que ce secours arrivait.

Un médecin était en tête des sauveteurs. Il fit transporter le blessé dans une maison voisine. Sa femme suivait à côté du brancard et Robert près d’elle écartait la foule sur son passage et la soutenait. Elle paraissait encore hébétée par la secousse qu’elle avait subie et regardait le blessé avec une expression vague de tristesse.

Le médecin lava la plaie béante et constata que le crâne était intact. L’évanouissement provenait du choc, la perte de sang causait une grande faiblesse. Il était impossible de dire encore quelles seraient les suites, mais il n’y avait aucun danger immédiat. Ce verdict rassura quelque peu la jeune femme. On lui représenta qu’elle devrait elle-même prendre quelque repos. Mais elle ne voulut pas quitter son mari, et elle finit par s’endormir de fatigue dans un fauteuil, à son chevet.

Robert dit aux bonnes gens de la maison qu’il reviendrait dans quelque temps s’occuper de ses compagnons d’infortune, et courut au lieu du sinistre. Le spectacle des ruines était horrible. Ses anciens compagnons du fumoir avaient le plus souffert. Ce char était tombé à l’endroit le viaduc traverse une coulée et s’était brisé sur la maçonnerie. Sur une vingtaine de personnes qui l’occupaient, presque toutes avaient été dangereusement blessées. Plusieurs étaient mortes, et leurs cadavres recueillis gisaient sous un hangar. Robert vit avec douleur les corps de ses compagnons de tout à l’heure. Il les reconnut à leurs vêtements, à la couleur de leurs cheveux et parce qu’il s’attendait à les trouver là. Mais ces faces congestionnées, ces traits immobilisés