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CHAPITRE XII

Au pays


« Chi raro viene, vien bene, » qui vient rarement est toujours le bienvenu, dit un proverbe italien. Le retour de Robert au foyer paternel fut un petit triomphe. Frères et sœurs, parents et amis, s’empressèrent autour de lui. Lorsqu’il se jeta en pleurant dans les bras de sa vieille mère qui l’attendait sur le seuil, il y eut parmi les spectateurs de ce retour bien des yeux humides.

Qu’on n’aille pas croire que du côté du jeune homme il y avait là de la mise en scène. Bien au contraire, il était ébranlé jusqu’au fond de l’âme.

Nous l’avons vu, Robert s’était fait égoïste et impitoyable par calcul, chose moins rare qu’on ne le pense chez les jeunes gens ambitieux et sans expérience. Il s’était confirmé dans ces vices par habitude, et ils le tenaient cloué au bas fond social. Si en ce moment-là la fortune lui avait souri, il n’en serait devenu que plus endurci par l’impunité. Un heureux hasard lui avait fait découvrir son erreur. Nous l’avons vu s’humaniser au contact des hommes ; la pitié avait germé dans son cœur au spectacle des misères humaines.

Les circonstances lui avaient tendu le miroir ; il s’y était vu petit et méprisable. Dès lors il avait voulu se relever. Chose difficile. On ne sort pas du premier coup d’un état d’âme devenu habituel. Les remèdes héroïques sont difficiles à appliquer, et Robert n’était point un héros. Son intelligence était mal servie par un caractère qu’une mau-