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Robert Lozé

d’assistance furent nombreuses. Il les recevait sans empressement, attendant, ayant son idée, tenant son invention comme une menace au-dessus de toute l’industrie du bois.

Cette politique simple, mais profonde, lui réussit. Comme il l’avait prévu, la société puissante à laquelle il était attaché en qualité de contre maître, finit par s’émouvoir d’une situation qui pouvait, suivant le cas, ruiner ses affaires ou tripler ses profits. Les intéressés se réunirent. On manda le jeune ouvrier. C’était le moment qu’il avait longtemps et patiemment attendu. Il entra dans la salle des directeurs simple ouvrier. Il en sortit actionnaire et directeur d’usine.

Qu’on ne s’étonne pas de cette fortune rapide, dont on trouve aux États-Unis une multitude d’exemples. La plupart des inventeurs sont les victimes de leur tempérament. Ne sachant pas allier au génie le sens pratique que requiert l’application de leurs découvertes, ils deviennent la proie des exploiteurs. Ici, l’inventeur était tout autre. Intelligence originale, mais cultivée et pratique, chez lui, à l’instruction et au jugement, s’alliaient la sagesse, l’intégrité et la persévérance, fruits des patientes études d’un fils de ses œuvres.

Ce jeune homme s’appelait Jean Lozé. Il était le frère de notre ami Robert. Jean avait quitté sa famille et son pays à l’âge de quatorze ans, poussé par cette mystérieuse impatience, ce besoin impérieux d’élargir ses horizons qu’éprouvent souvent les hommes auxquels la Providence réserve une grande destinée. Il était d’abord passé dans les fabriques de la Nouvelle-Angleterre où les compatriotes ne manquent pas, puis, s’y trouvant encore trop à l’étroit, il s’était graduellement dirigé vers l’ouest, où les industriels du bois avaient fini par concentrer ses efforts et son travail.

Là, du reste, il rencontrait encore, parfois, les noms familiers de son pays. Ceux qui les portaient formaient