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CHAPITRE III

« Oportet vivere. »


La nécessité ! C’est le stimulant que donne au monde la nature et qui résume toutes les existences matérielles. C’est aussi le cri de toutes les misères. L’homme en fait souvent le voile de ses ambitions, l’excuse de ses défaillances, le prétexte de ses turpitudes. Voleur au coin du bois, financier véreux, prostitutions sociales publiques et privées jettent ce mot à la face de l’opinion qui les condamne plus souvent que la société ne les punit.

Les habiles sont plus nombreux que les désintéressés. Ils sont rares ces héros qui traversent la vie, le fiat justicia au fond du cœur. Dans les pays de vieille civilisation, où des populations innombrables se disputent le pain, on comprend que l’égoïsme féroce devienne en apparence — car il n’en est jamais nécessairement ainsi, — la loi inéluctable. Mais dans nos pays, où la richesse inépuisable de la nature attend encore le travail de l’homme pour la féconder, il est triste de constater que la lèpre du parasitisme, qui en est le principal signe extérieur, existe à l’état endémique et qu’elle se propage surtout parmi ceux qui par la nature des choses semblent être appelés à donner aux autres le bon exemple. Ortie qu’il est d’autant plus urgent d’arracher que ses racines sont anciennes et profondes. Legs funestes d’un état social qui n’existe plus.

Sous le régime français, une foule de soi-disant fils de famille, la plupart prolétaires — gens qu’il ne faut pas confondre avec les seigneurs terriens, qui furent dans leur temps