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ROBERT LOZÉ

vants et des commerçants jusqu’au cercle polaire. J’ai parcouru également le Nord-Ouest et l’Alaska. J’ai connu Juneau, j’ai accompagné Mercier, et j’ai recueilli des pépites au Klondike, bien avant la fièvre de l’or.

— Vous avez manqué là une belle occasion de vous enrichir.

— Peut-être. Mais vous devez comprendre que nous ne connaissions rien en fait de mines, que nous n’avions ni provisions ni outils. Du reste, le travail du mineur est bien pénible et nous n’y étions pas habitués. J’ai dû, dans le cours de ma vie passer à côté de bien d’autres richesses. Mais que voulez-vous, lorsqu’on n’a pas l’avantage de l’instruction, on ne comprend pas aussi bien les choses. D’autres ont depuis amassé des trésors, là où je n’avais vu, comme les Indiens, que des lacs et des grands bois, où se cachaient les animaux dont nous vendions la fourrure pour un peu de lard et de farine, de poudre et de plomb.

— Connaissez-vous les États-Unis ?

— Je suis allé chasser dans les plaines de l’Ouest, en passant par Chicago qui, à cette époque, ne ressemblait en rien à la grande métropole d’aujourd’hui.

— Les plaines de l’Ouest ! mais je les connais aussi, dit Alice. Je voudrais bien savoir ce que vous en pensez.

— Ce voyage-là a failli être mon dernier. Le pays, à l’époque dont je parle, était dangereux. La population, qui commençait à y devenir relativement nombreuse, était encore insuffisamment protégée par la loi.

Deux jeunes Français m’avaient retenu pour guide et nous avions chassé ici tout un été. L’année suivante, ils voulurent suivre le bison dans les plaines et ils me demandèrent de les accompagner, parce que je comprends l’anglais, et aussi un peu parce que nous étions devenus des amis.

Les hardes de bisons, maintenant disparues, se faisaient déjà rares. Nous dûmes voyager jusqu’au bout de