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robert lozé

à autre, il se dérobait à ses études, pour chercher des distractions. La maison de madame de Tilly était toujours celle qui lui plaisait davantage.

Il trouvait, comme autrefois et plus qu’autrefois, en cette aimable femme une amie et une confidente sûre et désintéressée. Elle cachait avec soin la tristesse qui lui venait parfois au cœur lorsque Robert lui parlait de ses projets et de ses espérances. Certes, elle s’en réjouissait sincèrement. Mais elle ne pouvait se défendre de comparer secrètement le sort de Robert et d’Irène avec celui qui lui était échu à elle. Sauf cette réserve que son bon cœur lui imposait, elle se livrait plus franchement qu’autrefois sachant que le cœur de Robert était occupé. Celui-ci apprit les circonstances malheureuses de sa vie. Là aussi les rôles étaient changés. C’était Robert maintenant qui avait pitié et qui consolait.

Madame de R. se trouvait souvent, nous le savons, chez sa parente, madame de Tilly. Lorsqu’elle y rencontrait Robert, elle le traitait comme autrefois, quelquefois avec indifférence, le plus souvent avec une certaine faveur un peu dédaigneuse. Pour elle, il n’était que le premier venu. Un jour, en sa présence, madame de Tilly fit allusion aux fiançailles du jeune avocat et d’Irène.

— Vous dites ? s’écria la vieille dame.

— Que M. Lozé épouse mademoiselle de Gorgendière.

— Notre cousine, Irène de Gorgendière ?

— Mais oui. Ne le saviez-vous pas ?

— Ma foi non. Comment aurais-je pu m’en douter ?

Elle accentua cette remarque d’une grimace expressive qui autrefois aurait désolé le jeune homme, mais qui maintenant le fit sourire.

Je ne savais pas, madame, dit-il, que vous fussiez l’alliée de mademoiselle de Gorgendière.

— Voyez donc ! Voyez donc ! continua la vieille dame