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DEUX DE TROUVÉES.

il n’y a pas de réplique : bien ou mal il faut faire le couplet.

— Je vais l’aider, ; dit Hermine à sa sœur, en la prenant par la main et l’entraînant dans la chambre voisine.

Elle prit une plume et écrivit :


Dans le doute, vaut mieux se taire
Sur ces vieux sentiments d’un jour !
Si je jugeais, il peut se faire
Que je me trompasse à mon tour.
Mais pourtant ?… Dans cette tendresse.
Dans cette ardeur, dans cette ivresse,
Quand je sens mon cœur de moitié.


— Qu’écris-tu donc, là, Hermine ? crois-tu que je vais donner ces vers-là ? c’est absurde de parler ainsi.

— Que tu es prosaïque ! c’est ce qu’il y a de mieux. C’est ce qui s’appelle préparer l’antithèse. Suis la gradation : d’abord je l’attendris, tendresse : tu t’exaltes, ardeur ; puis tu arrives jusqu’à l’ivresse et quand tu es bien enivrée, je te fais tomber, paf ! sur la vulgaire amitié. C’est là une chute !

— Tu es folle.

— Pas du tout, au contraire ; je suis poëte et cultive l’ellébore, voilà le secret. Écoute, le dernier vers


Ça doit bien être (bis) l’amitié !


— Vois-tu, continua Hermine, ce n’est que de l’amitié tout simplement ; c’est bien le moins que tu puisses avoir pour lui, après ce qu’il a fait pour toi cette après-midi. Et d’ailleurs ce n’est qu’une chanson ! Toutes les chansons parlent d’amour, sans que l’on y fasse attention ; l’amitié peut bien y trouver sa place.