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UNE DE PERDUE

— Oui, mé y a manqué de tuer le bœuf à poupa ! répondit l’autre.

St. Luc, en arrivant à son hôtel, monta à sa chambre et changea de vêtements. Les événements de l’après-midi t’avaient un peu agité. Il ne pouvait définir les sentiments qu’il éprouvait pour Mademoiselle Asile de St. Dizier. Etait-ce de l’amour était ce de l’amitié simplement ? il ne savait qu’en penser. Il aimait bien Hermine ; mais en elle c’était plutôt cette gaieté charmante qui lui plaisait ; il aimait à rire avec elle, à l’agacer pour entendre ses réponses pleines d’atticismes, mais quelquefois aussi un peu caustiques.

Avec Asile, il éprouvait un sentiment plus tendre ; sa voix, son chant avait quelque chose de si doux de si sympathique que, malgré lui, il devenait sérieux ; une molle et mélancolique ivresse s’emparait de ses sens ; avec elle il parlait peu, il aimait à être près d’elle, à sentir le frôlement de sa robe. Si c’était de l’amour, son amour était bien faible ; si ce n’était que de l’amitié, son amitié était bien forte !

Après son dîner, il hésita sur ce qu’il devait faire. Il aurait désiré aller chez Madame de St. Dizier, mais il craignait de les déranger ; peut être voudraient-elles se reposer de bonne heure après les émotions de la journée. D’un autre côté, il aurait bien voulu avoir de leurs nouvelles. Il s’habilla, prit sa canne et sortit, n’ayant aucune idée arrêtée sur le but de sa promenade. Bientôt il arriva à la porte St. Jean. Il ne savait que faire, avancerait-il, retournerait-il ? Il marcha encore sans pouvoir en venir à aucune décision ; déjà l’église St. Jean était loin derrière lui quand il aperçut qu’il était sur la