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DEUX DE TROUVÉES

nant, ne va pas faire de tapage ; tu sais que le capitaine nous a expressément ordonné de ne nous occuper en rien du tout de ce qu’on pourrait nous dire.

— C’est donc votre capitaine, cette espèce de tourlourou, qui vous donne de ces sortes d’ordres, répliqua le matadore. Eh bien ! moi je vous ordonne de me répondre, entendez-vous ; quel est le nom de votre capitaine et celui de son vaisseau ?

Les deux matelots haussèrent les épaules ; l’un d’eux se mit à siffler et le gros Tom se gratifia d’une énorme chique, qu’il fit violemment naviguer de tribord à bâbord de sa large bouche, en jetant un coup d’œil de travers sur cet insolent interlocuteur, qu’il avait fort envie de frotter, comme il disait. Mais les ordres du capitaine étaient précis et sans réplique. Nul abord n’eut osé désobéir.

Les esprits commençaient à s’échauffer et les affaires semblaient prendre une tournure à la guerre ; il s’en serait peut-être suivi quelque violence, si en ce moment quelqu’un n’eut crié :

— « Voici la garde du maître du Hâvre ! »

En effet, le maître du Hâvre à cheval, accompagné de sa garde de service, arrivait au grand trot. Après avoir fait rapidement l’inspection des bassins il descendit à l’Hôtel d’Angleterre.

En ce moment le capitaine Pierre sortait du consulat, accompagné de deux jeunes demoiselles auxquelles il offrit galamment le bras. À quelques pas en arrière suivait un monsieur d’une cinquantaine d’années, qui parlait avec animation au consul anglais.

Cependant le matadore, qui voyait avec peine échapper l’occasion d’apprendre ce qu’il désirait et qui avait ses raisons de ne pas se faire remarquer