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UNE DE PERDUE

saisi le beaupré ; déjà leurs pieds touchent les bastingages, la lame de leurs sabres brille au reflet de la lumière du fanal, ils se baissent pour sauter sur le pont, quand tout à coup on entend une voix qui crie :

— Feu !

Et la détonation d’une trentaine de mousquets retentit dans le silence de la nuit ; les balles sifflent et cinq à six pirates culbutent à la mer, frappés à mort ; d’autres tombent blessés sur le pont.

— Dieu, mes enfants, cria le capitaine, en avant maintenant !

Les marins du Zéphyr s’élancent sur le gaillard ; le capitaine ordonne de mettre le feu au chaudron, et une immense flamme s’élance et répand au loin sa lumière sur les eaux. Ce fut alors une horrible mêlée. Les pirates montent par les amarres, se hissent les uns sur les autres ; ils lancent leurs grapins dans les cordages et grimpent dans toutes les directions. Une voix retentit qui les encourage. C’est Cabrera, Antonio Cabrera leur chef. Il est sur le gaillard d’avant avec une dizaine des siens, repoussant l’attaque et favorisant l’abordage des pirates. Le tumulte est à son comble. Tout est confusion. Pirates et Zéphyr sont confondus. C’est une lutte acharnée, homme à homme ; tout se culbute et se relève pour rouler et se culbuter encore. Les fusils ne servent plus ; les pistolets sont déchargés. Le sang ruisselle et rend le pont glissant. Tous les pirates sont maintenant montés, Le gaillard d’avant est trop petit pour les contenir. Les Zéphyrs semblent céder sous les efforts prodigieux de Cabrera et de ses gens. La flamme bleuâtre de l’alcool et des combustibles, qui brûlent