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de toute l’Europe pour son dévouement à son pays, son antagonisme contre l’Autriche et le long emprisonnement qu’il avait subi au Spielberg avec Silvio Pellico. J’ai su aussi qu’il connaissait le marquis Lorenzo Pareto, de Gênes, et le marquis Visconti, de Milan, que j’avais connu moi-même. J’allai lui faire une visite. Nous causâmes beaucoup sur les affaires de l’Italie : de la conformité d’opinion naquit ce jour-là, entre nous, une amitié qui n’a jamais faibli.

Le dimanche 28, je trouve à la piscine un gros curé qui voulait absolument apprendre à nager. Faute d’autre professeur, je lui donne une leçon et, ma foi, ses progrès étaient rapides, quand arrive le terrible quatuor dont l’entrée fut annoncée par cette exclamation du garçon de bain qui s’écria : Ah ! voici nos gueulards ! À peine furent-ils à l’eau, que tout y fut sens dessus dessous. Force fut donc de discontinuer ma leçon et de me rhabiller au plus vite. Le curé continua à s’exercer seul, et il vint dans l’idée à nos garnements de l’en empêcher en dansant et gigotant autour de lui. Il les pria de s’éloigner. Ils n’en firent rien ; au contraire, l’un d’eux redoubla d’insolence jusqu’à lui monter sur le dos. Alors la patience lui manqua : de ses bras d’hercule, il souleva l’impertinent écolier et lui administra une correction d’après l’ancienne méthode, au rire inextinguible de tous les spectateurs qui crièrent bis, et si bien que notre polisson, en butte aux railleries de ses camarades, prit le parti de la retraite, à la satisfaction générale.

À dîner apparaissent deux figures au teint blafard, qui font tressaillir notre Anglaise qui croit voir une résurrection.