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qui ont vécu sur sa surface. Ces abîmes, où la tempête ne pénètre pas, sont conservateurs : là, des myriades d’animalcules, après avoir vécu des parties molles des corps, s’attachent aux charpentes osseuses et les couvrent d’un test qui les éternise. Ainsi que tout ce qui est matière, noble globe finira ; mais avant que cette fin arrive, ses habitants auront encore appris bien des choses, car de ce globe nous ne connaissons pas la millième partie.

Mais j’en reviens à mon voyage. Nous côtoyons toujours le Rhône. La campagne ne s’embellit pas ; on est encaissé entre des masses alluviennes. Une île de sable, où végètent quelques buissons souvent inondés, partage la rivière.

Le fleuve continue à se déployer ; il est ici large comme est la Seine à Paris, et, un peu plus loin, comme est la Tamise à Londres, mais peu profond.

À la station de Seyssel, le Rhône devient navigable ; il s’élargit encore, et la vallée s’étend avec lui. On aperçoit partout des vignes : le vin de Seyssel a une certaine réputation. L’eau du fleuve semble bleue. Je vois un bateau en marche, et quatre petits canots sur la rive.

Il est huit heures un quart. La vallée, qui tout entière a dû être l’ancien lit du Rhône, a cent deux kilomètres de large. Montagnes à droite ; à gauche, des vignes.

Voici la station de Culoz. Non loin de là, près d’Artemore, sont la cascade de Cerveyrieu qui tombe de cinquante mètres de hauteur, et le mont Colombey, du haut duquel on a, dit-on, une vue des plus étendues ;