Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les armoiries des principaux habitants de 1558 à 1606, et celles des cantons suisses, sont fort beaux. J’admire surtout ces guerriers dans les positions les plus pittoresques formant les supports, et les couleurs éclatantes de chaque écusson, qui ressortent par l’effet d’un cercle de verre limpide et éclairé.

Toujours conduit par mon cicérone, lequel, je m’en aperçois bientôt, n’est pas fort sur l’histoire de sa ville qu’il mêle à beaucoup de contes, je vais voir le monument érigé en commémoration des soldats suisses tués par la populace, le 10 août 1792, en défendant les Tuileries. Ce monument consiste en un lion gigantesque de neuf mètres de long et de six mètres de haut, sculpté en relief sur le rocher même. C’est un beau travail exécuté, d’après un modèle de Thorwaldsen, par le sculpteur Ahorn, né à Constance. On dit que le premier modèle donné par Thorwaldsen était médiocre ; il s’en aperçut, et en fit un second : c’est celui qui a été exécuté. Le gardien du monument, Paul-Joseph Los, âgé de quatre-vingt-deux ans, est le dernier des survivants à cette journée où périrent, dit-on, vingt-six officiers et seize cents soldats. Je crois ce chiffre exagéré.

Je retourne à l’hôtel pour déjeûner. Le poisson du lac y est, comme toujours, le plat d’honneur. Chaque lac a son poisson favori, auquel les hôteliers du lieu devraient élever une statue, car ils lui sont redevables de leur fortune : l’agone, la truite, le lavaret, l’ombre chevalier, etc., tous fort bons, sans valoir pourtant le poisson de mer. Le vin blanc de Lucerne a aussi sa réputation.

À dix heures, je prends la voie ferrée qui conduit à