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Des semaines, des mois, ils se sont sans arrêt
Battus, battus encor, battus toujours. Des larmes
De sang baignaient, parfois, les canons de leurs armes,
Quand, blessés, ils devaient s’arrêter à regret.

Ou bien ils sont tombés au creux d’une tranchée,
Au fond d’une forêt, en montant à l’assaut
D’un mamelon bordé d’un paisible ruisseau,
Où quelque pièce à tir rapide était nichée…

Les voici maintenant côte à côte étendus.
Dans l’enclos ignoré d’agrestes cimetières ;
Les voici dans les champs tout proches des frontières ;
Les voici dans des bourgs et des sites perdus.

Loin du suprême abri des tombes de famille,
Du village natal et du clocher béni,
Ils dorment, face au ciel, voisins de l’ennemi,
Mais c’est l’azur français qui sur leurs restes brille ;

Plus heureux qu’en exil leurs frères prisonniers
Qui meurent tristement, privés de la patrie,
Le sol de France enclôt leur dépouille meurtrie
Que bercent les concerts d’oiselets des halliers…

— Nos plants reverdiront demain ; et chaque ruine,
Comme vos corps martyrs se couvrira de fleurs ;