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Il alla ensuite au canot et en revint portant une espèce de tige en fer qui pouvait à la rigueur servir de bêche, avec laquelle il se mit à fouiller la terre, au pied des aulnes. Après deux ou trois minutes de ce travail, plongeant sa main dans la terre ameublie, il en retira deux vers, dont l’un gros et long, qu’il rompit en deux tronçons. Il en mit un de côté et, avec l’autre, il amorça son hameçon, qu’il rejeta dans la rivière, non sans avoir soigneusement craché sur le ver et en le lançant aussi loin vers le milieu que le lui permettait sa ligne.

L’hameçon était à peine enfoncé d’une couple de pieds que, soudain, la ligne se raidit et se mit à décrire des cercles dans l’eau. Le Suisse releva vivement la branche qui lui servait de canne à pêcher, et un brochet d’une couple de livres vint, en frétillant, tomber parmi les hautes herbes de la berge.

Notre pêcheur s’empressa de le décrocher. Il l’enfila dans une branche en forme de crochet coupée dans le même buisson qui lui avait fourni sa canne à pêcher, répara, du mieux qu’il pût, les dommages causés à son ver par les dents du brochet, et rejeta sa ligne à l’eau.

Mais laissons là le Suisse, pêchant brochets, carpes et gougeons. Suivons plutôt Ohquouéouée et son compagnon, s’en allant à la recherche de la source que le Suisse vient d’appeler : « La Fontaine de Jouvence, » mais que nous appellerons, de son véritable nom : la Source Saint-Léon ; probablement la première source d’eau minérale connue des Blancs, en Amérique.

Dès qu’ils eurent dépassé le coude de la rivière, au-dessus de l’endroit où les deux aventuriers avaient