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CHAPITRE V.

sonance et dissonances bien marquées. Les accords ne sont beaux qu’avec les intervalles justes, ce qui arrive rarement, parce que les chanteurs sont habitués à l’accompagnement d’instruments accordés suivant le tempérament égal.


45. Consonances et dissonances sur les instruments à cordes. — Sur les instruments à archet, les harmoniques sont particuliérement intenses, perceptibles jusqu’au sixième ou au huitième selon que l’archet s’approche davantage de la touche ou du chevalet. Les consonances seront donc particulièrement bien définies. Mais les accords complets deviennent durs et les accords prolongés peu harmonieux.

Il faut faire à propos des battements de ces instruments une remarque curieuse. À cause des petites irrégularités de l’action de l’archet sur la corde, il y a de brusques et inévitables changements de phase une ou deux fois par seconde au moins. Supposons deux violons jouant à l’unisson, ou donnant un accord tel qu’un des harmoniques de chacun des deux sons soit rigoureusement commun. Il y a interférence, et le son résultant dépend de la phase relative des deux sons interférents ; puisque cette phase varie une ou deux fois par seconde, il y aura variation d’intensité, alors même que l’unisson serait parfait. Si l’unisson n’est pas parfait, il y a battements pendant le temps qui sépare deux irrégularités. Il résulte de là : 1o qu’il est extrêmement difficile d’entendre des battements lents dans un accord donné par un ou deux violons ; 2o qu’il y aura dureté dans un accord, même s’il y a unisson parfait et a fortiori si l’unisson n’est pas parfait. Helmholtz attribue à ces causes l’aigreur particulière des quatuors cordes exécutés par des artistes qui ne sont pas éminents.

Les sons graves du piano sont très riches en harmoniques et les sons aigus relativement pauvres. Dans le grave, l’octave et la douzième sont quelquefois aussi intenses que le fondamental ; donc les septièmes et neuvièmes, dissonances voisines de l’octave, sont aussi désagréables que les secondes. Les douzièmes et les quintes fausses sont très dures. Mais les intensités des harmoniques diminuent très rapidement avec leur numéro d’ordre ; les tierces fausses ne sont pas trop dures, parce que l’intervalle de tierce est surtout déterminé