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Feuilleton du COURRIER DE SION
— 33

Quand la comtesse reprit connaissance, elle vit avec surprise qu’elle était enfermée dans une sorte de cachot, humide qu’éclairait un flambeau.

Autour d’elle trois murs et une grille de fer aux barreaux épais qu’elle essaya en vain d’ébranler.

Elle poussa un suprême cri de désespoir et se laissa tomber sur le sol.

Elle était prisonnière ! Elle était isolée du monde ! Elle était ensevelie vivante, dans un caveau.

. . . . . . . . . .

Le chevalier d’Arsac se réveilla joyeusement à 7 heures du matin. Il examina les objets qui l’environnaient.

— Où suis-je se demanda-t-il, les yeux lourds encore de sommeil ? Hé ! mordious ! Je me souviens, je suis au Château de Carteret. Je n’ai jamais si bien dormi. Occupons-nous maintenant de nos petites affaires.

Il fit ses ablutions, s’habilla et descendit. Le baron de Carteret l’attendait.

— Ah ! ah ! nous voilà, mon cher Gaston ! s’écria-t-il en lui serrant les mains avec affection. Eh bien ! comment vous trouvez-vous ce matin ? Êtes-vous remis de votre indisposition ?

— De mon indisposition, monsieur le baron ? Mais je n’ai jamais été malade.

— Voyons, mon cher gendre, avouez qu’hier vous avez eu une petite, comment dirais-je, une petite émotion.

— Ah ça ! monsieur, vous persistez donc à me considérer comme votre gendre ?

« Voilà sa folie qui le reprend ! » pensa le baron effrayé. Et il détourna la conversation.

Comme les deux hommes pénétraient dans la salle à manger, un valet vint dire qu’un étranger priait M. le comte de Savignac de vouloir bien lui accorder une entrevue de quelques instants.

— Quel est son nom ? demanda d’Arsac.

Le laquais tendit une carte de visite sur laquelle le chevalier lut :

César Poiroteau

« César Foiroteau ! pensa d’Arsac. Ce maudit Poiroteau ! ce créancier qui me poursuit comme un remords !

Et, en maugréant, il accorda l’entrevue demandée.

Il pénétra dans une salle de réception où l’attendait un petit homme replet, aux yeux fureteurs.

— Monsieur Poiroteau ! s’écria le chevalier. À quel heureux hasard dois-je l’honneur de votre visite ?

— Ah ! monsieur le chevalier, ce n’est pas le hasard qui m’a amené ici ; c’est la providence. Avant-hier j’ai appris avec plaisir que vous vous mariez.

— C’est une erreur, monsieur Poiroteau.

— Une erreur, monsieur le chevalier, fit le créancier avec une grimace déçue. Mais voyez, j’ai ici trois journaux annonçant votre mariage. En apprenant cette heureuse nouvelle, je me suis dit : « Ah ! monsieur le chevalier est un de mes bons clients. Il n’est que juste que j’aille lui présenter mes respectueuses félicitations.

— Ah ! digne et fidèle M. Poiroteau, dites plutôt que ce n’est pas seulement des félicitations que vous venez me présenter, mais surtout un petit compte arriéré. Vous vous êtes dit : « Il y a quelque temps déjà que, depuis ce certain voyage que nous fîmes en Afrique, M. le chevalier d’Arsac n’a plus donné signe de vie. Aujourd’hui il est marié, il a épousé