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Feuilleton du COURRIER DE SION
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Et le moine, reprenant la lanterne sourde, qu’il avait déposée par terre, tourna les talons et revint sur ses pas.

Legay et Sauvage n’eurent que le temps de fuir à reculons. Le moine marchait rapidement. Il s’engagea enfin dans la troisième galerie de gauche. Les deux cambrioleurs le suivirent à une distance respectueuse.

L’homme à la cagoule arriva dans un vaste caveau qu’il examina attentivement. Il s’arrêta devant une dalle de marbre encastrée dans le mur. Il déposa sa lanterne à terre et regarda autour de lui.

N’ayant rien découvert de suspect, il se dévêtit de la cagoule qui l’enveloppait et apparut habillé d’une façon toute moderne et toute laïque.

— Morbleu ! murmura Legay, je le reconnais : c’est Bastien Génis, l’ancien majordome du château de Baulieu, le complice des barons de Gramat, le meurtrier du comte Georges l’homme qui me disputa le petit pâtre de plâtre. Je comprends tout ! C’est lui qui s’est introduit dans le château en notre absence et nous a volé le précieux parchemin et la traduction. Dame ! il connaissait la place : il y a vécu de nombreuses années, il était là comme chez lui. Ah ! mon colon ! tu veux me voler « voler le trésor », mais nous sommes là, et cette fois, nous sommes armés. Attention ! mon ami Sauvage, le moment d’agir est proche !

Le faux moine avait tiré de sa poche un marteau et un ciseau et descellait la dalle de marbre encastrée dans le mur.

Il y travailla pendant une demi-heure. Enfin, la dalle céda sous son effort, et un nouveau couloir, à peine assez large pour livrer passage à un homme apparut.

Bastien Génis s’y engagea, tenant en main sa lanterne. Legay et Sauvage le suivirent silencieusement.

L’ex-majordome avançait rapidement : on devinait la hâte fiévreuse qui l’agitait. Enfin, il atteignit l’extrémité du couloir, au fond duquel apparaissait un nouveau caveau.

Mais, soudain, un bruit formidable se fit entendre, éveillant les échos souterrains. Au même instant, un énorme bloc de pierre s’abattit sur le faux moine, l’écrasant, le broyant, sous sa masse puissante.

Legay et Sauvage reculèrent en frémissant. Ils ne savaient que faire. Ils n’osaient avancer ni reculer. Enfin, Legay recouvra son sang-froid ; il pressa le bouton de la lampe électrique et examina les lieux.

Le couloir était à demi obstrué par l’énorme bloc de pierre sous lequel gisait le cadavre de Bastien Génis. Celui-ci avait été tué sur le coup. Son sang coulait à flots, glissant entre les fissures du granit.

— Avançons prudemment, dit Legay.

Ils arrivèrent près du cadavre et ils constatèrent alors que Génis avait été pris comme dans une souricière. Il avait mis le pied sur une trappe qui, sous cette poussée, avait déclenché un formidable ressort, et la pierre fatale, suspendue comme une épée de Damoclès, s’était abattue sur l’audacieux ravisseur du trésor.

— Que faire ? demanda Sauvage.

— Là derrière, il y a une fortune qui vaut que nous risquions notre vie. Soyons prudents, cependant. Au surplus, je ne crois pas que le caveau contienne une seconde trappe : c’est un heureux hasard qui a mis Génis devant nous pour nous ouvrir le passage. Voilà ce que c’est d’être trop pressé ! C’est égal, nous l’avons échappé belle !