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C’était sa tactique triomphante. Il unissait la force à la souplesse.

Il enjamba les corps des blessés et des morts et se dirigea vers la porte : il s’aperçut qu’elle avait été verrouillée à l’intérieur. Comme il allait l’ouvrir un coup de feu retentit. Un blessé avait tiré vers lui, sans l’atteindre, heureusement. Il ouvrit enfin la porte.

Quelle ne fut pas la surprise de M. Corbier en le voyant reparaître.

— C’est fini ! dit d’Arsac, mais ne perdons pas de temps !…

— Vous n’êtes pas blessé, monsieur le chevalier, demande anxieusement le maître-maçon.

— Non, mon ami, mais dans la mêlée, j’ai perdu votre lampe électrique. Tâchons de la retrouver.

En tâtonnant, ils eurent la chance de mettre la main sur le précieux luminaire. Ils continuèrent leur inspection. Arrivés devant les mansardes, une porte résista. Ils l’abattirent. Un cri de terreur arriva jusqu’à eux. Ils avancèrent avec angoisse. Dans un coin de la mansarde, Mme Corbier gisait, ligotée.

— Ma femme, ma pauvre femme ! gémissait l’ouvrier.

Mais il s’aperçut bientôt avec une joie déchirante, que sa femme n’était pas blessée. On coupa les liens. Elle raconta alors que des hommes inconnus l’avaient enlevée et conduite dans cette maison, la menaçant de la tuer si elle lançait le moindre appel. L’un d’eux lui avait fait écrire, sous la menace du revolver, la lettre qu’avait reçue son mari, puis on l’avait garottée.

— Cette lettre était donc une amorce pour nous attirer dans un guet-apens, dit M. Corbier.

— C’est bien ce que je pensais, répliqua le chevalier. Ce procédé ne leur a pas porté bonheur et a eu un effet inattendu. Partons.

— Et la victime cachée sous mon mur ? questionna timidement le maître-maçon.

— C’est vrai, je l’oubliais. Allons voir.

Ils descendirent. Le maître-maçon à l’aide d’un marteau et d’un poignard ouvrit la muraille qui, sous une suprême poussée s’effondra. Il déblaya le parquet et mit à jour la fameuse caisse. À la clarté de la lampe, il lut cette inscription qu’il n’avait pas remarquée, la première fois, sur le couvercle : « Ci-gît le troisième imposteur ».

Il ouvrit la malle : un cadavre en état de putréfaction apparut. À l’endroit du cœur était fiché un stylet sur la poignée duquel étaient écrits ces mots : « La Sainte-Vehme ». Quant au visage du mort, il était devenu presque méconnaissable.

Le chevalier d’Arsac sortit, suivi de M. et Mme Corbier. Ceux-ci se rendirent au commissariat de police le plus proche faire leur déposition ; quant à notre Gascon, il se déroba aux témoignages de reconnaissance de ses protégés en leur disant :

— Pardonnez-moi, mes ennemis m’attendent chez moi.


Les compagnons de la Sainte-Vehme


Le lendemain, le chevalier d’Arsac fut appelé au commissariat de police où on le pria de contresigner la déclaration de M. et Mme Corbier et de donner, s’il lui était possible, des renseignements complémentaires.

Des gardiens de la paix avaient fait une perquisition dans la mystérieuse maison de la rue d’Oran. Deux des agresseurs du chevalier n’étaient point morts ; mais ils avaient refusé de fournir le moindre renseignement sur les mobiles de leurs actes et sur leur personnalité.

On devinait que ces hommes étaient liés par un secret terrible dont la révélation eût mis leur vie en danger. Quant au cadavre trouvé derrière le mur élevé par M. Corbier, on n’avait pu l’identifier.

Le mystère de la Sainte-Vehme restait impénétrable.