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pour la première fois une expression à leurs sentiments. Botrel les attendrit, puis il les fait rire ; il les réunit en leur proposant des pensées chères à tous et surtout en leur donnant physiquement un rythme.

« Il nous faut la victoire, pour venger le drapeau », leur chante-t-il sur un vieil air populaire. Et puis c’est la Lettre du soldat à sa grand’mère : « Si je meurs (dame ! faut tout prévoir), — priez Dieu, pour moi chaque soir, — et réconfortez la Marie : — dites-vous, fières de cela — que je suis mort en bon soldat, — pour la Patrie ». Mais, au moins, n’allez pas larmoyer ! Voici sur l’air de Marlborough un « Guillaume s’en va-t-en guerre » qui déchaîne un immense rire. Et quel succès pour Les Goths, chanson d’actualité : « Je viens d’explorer en Champagne, — châteaux et maisons de campagne — d’où l’état-major allemand — vient de déguerpir lestement. » La propriétaire revient. « À ses hôtes d’une semaine, — montrant le sac de son domaine, — elle dit, jupon haut troussé — et le nez gentiment pincé : — La France a subi les ravages, — messieurs, de trois hordes sauvages, — Goths, Ostrogoths et Visigoths : — il lui manquait les Saligoths ! » Avouez que ça n’est pas mal. Puis c’est Les lauriers vont fleurir. Le Paimpolais, Plumons-la donc, En revenant de guerre, etc.

Et, pour finir, la Kaisériole, sur l’air de la Carmagnole : « Le Kaiser s’était bien promis — d’être en sept, huit jours à Paris. — Mais il ne l’a pas pu, — grâce au Belge têtu », etc., etc.

Vous sentez bien qu’à ces couplets-là, depuis longtemps, la verve de Botrel avait achevé de se répandre