LE COUTEAU
— « Pardon, Monsieur le Métayer,
Si, de nuit, je dérange,
Mais je voudrais bien sommeiller
Au fond de votre grange…
— Mon pauvre ami, la grange est pleine
Du blé de la moisson,
Donne-toi donc plutôt la peine
D’entrer dans la maison !
— Mon bon Monsieur, je suis trop gueux :
Qué gâchis vous ferais-je !
Je suis pieds-nus, sale et boueux
Et tout couvert de neige !
— Mon pauvre ami, quitte bien vite
Tes hardes en lambeaux :
Pouille-moi ce tricot, de suite ;
Chausse-moi ces sabots !
— De tant marcher à l’abandon
J’ai la gorge bien sèche :
Mon bon Monsieur, bâillez-moi donc
Un grand verre d’eau fraîche !
— L’eau ne vaut rien lorsque l’on tremble,
Le cidre… guère mieux :
Mon bon ami, trinquons ensemble,
Goûte-moi ce vin vieux !