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« Meuh ! disait une vache rousse,
« À ses voisins les grands bœufs roux,
« Les hommes sont bien durs pour nous :
« Tout les offense et les courrouce,

« Matin et soir je leur dispense
« Le lait dont sont gonflés mes pis :
« Meuh ! des coups de pieds, souvent pis,
« Voilà quelle est ma récompense ! »

« L’homme abuse de sa faiblesse »
Disaient les bœufs en gémissant :
« Son aiguillon nous pique au sang,
« Meuh ! Meuh ! son joug de bois nous blesse ! »

Hihan ! disaient l’âne et l’ânesse,
Hi ! hi ! gémissaient les chevaux :
« Nous aidons l’homme en ses travaux,
« Dès notre plus tendre jeunesse ;

« Nous tournons sa « machine à battre »
« Et transportons, roués de coups,
« Des faix vingt fois lourds comme nous…
« Et puis l’ingrat nous fait abattre ! »

Bèèh ! Bèèh ! disait la brebis blanche,
« Les pauvres moutons sont tondus ;
« Après quoi leurs cous sont tendus
« Au rouge boucher qui les tranche ! »

Moc’h !… et nous donc, disait la truie,
« Il nous soigne pour se nourrir ;
« Puis, quand il s’agit de mourir
« Il prolonge notre agonie ! »