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Je reconnais bien là le barde fer et doux
Dont le cœur est toujours où s’ouvrirent ses rêves :
Nous autres, qui vivons maintenant loin des grèves,
Nous aimons à parler avec ceux de “ chez nous ”.

Merci, car un Breton peut seul dire à voix haute
Qu’on s’honore là-bas des bravos recueillis :
Si nul ne fut jamais prophète en son pays,
On ne chante que vous de la Lande à la Côte.

La Bretagne eut toujours ses poètes charmeurs :
Par les sentiers fleuris d’ajoncs et de bruyère
Ils vont très lentement, graves comme en prière,
De la foule fuyant les banales clameurs.

Mais, si noble que soit le but qu’il veut poursuivre,
Le poète s’attarde en rêves décevants
Car, son poème écrit en des vers triomphants,
La forme le retient prisonnier dans un livre.

Mais ceux pour qui le Livre est à jamais fermé,
Qu’ils ne l’aient pas trouvé sur la route suivie
Ou que le tourbillon des choses de la vie
Les empêche d’ouvrir même l’ouvrage aimé,