négligence de tes héritiers le refuseront peut-être à ta mémoire : tant on pensera peu à toi quelques années après ta mort ! Ce qu’il y a d’assuré, c’est la peine de tes rapines, la vengeance éternelle de tes concussions et de ton ambition infinie. Ô les dignes restes de ta grandeur ! ô les belles suites de ta fortune !
Ô folie ! ô illusion, ô étrange aveuglement des enfants des hommes ! Chrétiens, méditez ces choses ; chrétiens, qui que vous soyez, qui croyez vous affermir sur la terre, servez-vous de cette pensée pour chercher le solide et la consistance. Oui, l’homme doit s’affermir ; il ne doit pas borner ses desseins dans des limites si resserrées que celle de cette vie : qu’il pense hardiment à l’éternité. En effet, il tâche, autant qu’il peut, que le fruit de son travail n’ait point de fin ; il ne peut pas toujours vivre, mais il souhaite que son ouvrage subsiste toujours : son ouvrage, c’est sa fortune, qu’il tâche, autant qu’il lui est possible, de faire voir aux siècles futurs telle qu’il l’a faite. Il y a dans l’esprit de l’homme un désir avide de l’éternité : si on le sait appliquer, c’est notre salut. Mais voici l’erreur : c’est que l’homme l’attache à ce qu’il aime ; s’il aime les biens périssables, il y médite quelque chose d’éternel ; c’est pourquoi il cherche de tous côtés des soutiens à cet édifice caduc, soutiens aussi caducs que l’édifice même qui lui paraît chancelant. Ô homme, désabuse-toi : si tu aimes l’éternité, cherche-la donc en elle-même, et ne crois pas pouvoir appliquer sa consistance inébranlable à cette eau qui passe et à ce sable mouvant. Ô éternité, tu n’es qu’en Dieu ; mais plutôt, ô éternité, tu es Dieu même ! c’est là que je veux chercher mon appui, mon établissement, ma fortune, mon repos assuré, et en cette vie et en l’autre. Amen.
XII
SERMON SUR LA MORT
« Le sermon sur la mort, dit M. Urbain, est peut-être le plus remarquable de ce carême du Louvre qui est