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autres, et tout le corps de l’estat estoit uni contre les méchans. Il n’estoit pas permis d’estre inutile à l’estat : la loy assignoit à chacun son employ, qui se perpetuoit de pere en fils. On ne pouvoit ni en avoir deux, ni changer de profession ; mais aussi toutes les professions estoient honorées. Il falloit qu’il y eust des emplois et des personnes plus considerables, comme il faut qu’il y ait des yeux dans le corps. Leur éclat ne fait pas mépriser les pieds, ni les parties les plus basses. Ainsi parmi les egyptiens, les prestres et les soldats avoient des marques d’honneur particulieres : mais tous les mestiers, jusqu’aux moindres, estoient en estime ; et on ne croyoit pas pouvoir sans crime mépriser les citoyens, dont les travaux, quels qu’ils fussent, contribuoient au bien public. Par ce moyen tous les arts venoient à leur perfection : l’honneur qui les nourrit s’y mesloit par tout : on faisoit mieux ce qu’on avoit toûjours veû faire, et à quoy on s’estoit uniquement exercé dés son enfance. Mais il y avoit une occupation qui devoit estre commune ; c’estoit l’étude des loix et de la sagesse. L’ignorance de la religion et de la police du païs n’estoit excusée en aucun estat. Au reste, chaque profession avoit son canton qui luy estoit assigné. Il n’en arrivoit aucune incommodité dans un païs dont la largeur n’estoit pas grande ; et dans un si bel ordre, les faineans ne sçavoient où se cacher.