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qui a veû ces choses, a reconnu en les voyant, que le royaume de son fils n’estoit pas de ce monde. Il ne s’en étonne pas, car il sçait que le monde passe ; et un prince toûjours si humble sur le trosne voyoit bien qu’un trosne n’estoit pas un bien où se deussent terminer ses esperances. Les autres prophetes n’ont pas moins veû le mystere du messie. Il n’y a rien de grand ni de glorieux qu’ils n’ayent dit de son regne. L’un voit Béthléem la plus petite ville de Juda illustrée par sa naissance ; et en mesme temps élevé plus haut, il voit une autre naissance par laquelle il sort de toute eternité du sein de son pere : l’autre voit la virginité de sa mere, un Emanuël, un Dieu avec nous sortir de ce sein virginal, et un enfant admirable qu’il appelle Dieu . Celuy-cy le voit entrer dans son temple , cét autre le voit glorieux dans son tombeau où la mort a esté vaincuë. En publiant ses magnificences, ils ne taisent pas ses opprobres. Ils l’ont veû vendu à son peuple , ils ont sceû le nombre et l’employ des trente pieces d’argent dont il a esté acheté . En mesme temps qu’ils l’ont veû grand et élevé , ils l’ont veû méprisé et méconnoissable au milieu des hommes ; l’étonnement du monde, autant par sa bassesse que par sa grandeur ; le dernier des hommes ; l’homme de douleurs chargé de tous nos pechez ; bien faisant, et méconnu ; défiguré par ses playes, et par là guerissant les nostres ; traité comme un criminel ; mené au supplice avec des méchans, et se livrant,