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GILLES DE RAIS.

blances, il y était venu rejoindre La Hire, furieux d’avoir perdu une place importante qui était sa conquête.

M. Paul Marchegay, à qui l’on doit la publication du document qui nous guide ici, pense que Gilles de Rais était à Louviers en 1430, comme faisant partie de l’expédition de Normandie ; « peut-être, ajoute-t-il, pour tenter de délivrer Jeanne d’Arc, dont le procès avait cours à Rouen. » Opinion qui n’est pas dépourvue de vraisemblance, quand on se rappelle qu’à Rouen même, plusieurs Anglais, vers la même époque, craignant que Jeanne ne fût délivrée par les Français, l’auraient volontiers jetée à la Seine. Il y avait, en effet, à Louviers, une véritable armée dont l’un des corps avait été équipé, comme pour l’attaque de Jargeau et la campagne de la Loire, par les soins et aux frais du maréchal de Rais. Lui-même nous l’apprend par un acte authentique, signé de sa main, et jusqu’ici inconnu, dans lequel il dit et reconnaît « qu’il doit à Rolland Mauvoisin, son écuyer, capitaine du Prinçay, la somme de huit vingts écus d’or pour achat d’un cheval moreau, sellé et bridé, qu’il a promis à son très cher et bien aimé écuyer Michel Machefer, capitaine de gens d’armes et de traies de sa compagnie, pour l’engager à venir avec lui en ce voyage, aussitôt leur arrivée à Louviers. » Ce document est du 26 décembre 1431, et signé « Gilles ». Avec La Hire, Richemont, et plusieurs autres capitaines, il est donc autour de Rouen, combattant pour le roi, et peut-être pour la Pucelle, tandis que le roi et la Trémoille jouissent sans trouble du repos aux bords de la Loire ; il est donc du parti de la guerre contre le parti de la paix, avec Jeanne d’Arc contre la Trémoille et Regnault de Chartres[1]. Quelques jours encore, et les courageux chevaliers surprendront, mais hélas ! trop tard, la ville de Rouen ; en mars 1432, ils prendront Beauvais ; au mois d’août suivant, Gilles de Rais fera lever le siège de Lagny. On ne peut donc en douter : il était de ceux qui voulaient la guerre ; il avait honte

  1. Wallon, II, p. 300.