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GILLES DE RAIS.

passer. Non que l’issue du procès fût douteuse : les crimes, qui avaient été prouvés, et surtout la sentence de mort prononcée contre Henriet et Poitou, ne laissaient aucune espérance d’acquittement ou de pardon en faveur du principal coupable : cependant, malgré la certitude que l’on avait de la destinée du maréchal, au fond de toutes les âmes il y avait cette vague inquiétude, mélange de curiosité et d’émotion, qui précède toujours un grand événement. Aussi, dès la matinée du 25 octobre, une foule énorme se porta sur le Bouffay et l’envahit à tel point qu’elle regorgeait sur la place et dans les rues avoisinantes.

Pour arriver jusqu’à la salle où siégeait le tribunal, le maréchal dut traverser, en criminel, cette multitude qu’il avait jadis éblouie par son faste. La séance s’ouvrit au milieu de la curiosité et des rumeurs de l’assemblée. Lorsque le procureur eut fini de dresser l’accusation, le président de Bretagne, s’adressant à Gilles de Rais, l’engagea à renouveler « à plein » ses aveux devant toute la foule, l’assurant que la honte qu’il en éprouverait, servirait à l’allégement de sa peine. Les sentiments de repentir et de résignation, où Gilles était depuis quelques jours, ne se démentirent pas dans ces derniers moments et devant les derniers juges. En présence de tous les assistants émus, étonnés, il recommença tout au long cette confession publique qu’il avait déjà faite devant les juges ecclésiastiques. Mais il appuya particulièrement sur les fautes qui l’amenaient devant la cour séculière. C’est ainsi qu’il avoua, en la déplorant du fond du cœur, sa funeste révolte contre le duc, son suzerain ; l’emprisonnement de Jean Le Ferron et les violences exercées sur les officiers et les gens du duc de Bretagne. Mais sa douleur et son repentir éclatèrent surtout, et sur son visage et dans ses paroles, quand la suite de son récit l’amena aux crimes commis sur les enfants. Ses pleurs, qui n’avaient cessé de couler depuis qu’il parlait, redoublèrent et, plus que ses paroles, prouvèrent la sincérité de ses regrets.

Toute la vérité apparaissait dans la lumière de ces der-