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GILLES DE RAIS.

permet de combattre les conclusions prises contre lui, mais on emploie même les prières, et lorsque les prières ne produisent pas leur effet, on se fait des plus graves menaces un motif pour l’obliger à présenter sa défense ou à s’avouer coupable. Bien plus encore, on le laisse libre de poser lui-même les questions aux témoins ; l’excommunication enfin est lancée contre lui, uniquement parce qu’il refuse de se défendre ; on ne décide rien, en un mot, on ne s’arrête à aucune résolution, que tout n’ait été placé dans une pleine et pure lumière. De violence, nulle part ; la question même n’est qu’une menace, même contre ses complices, quels qu’ils soient, même contre Henriet et Poitou, exécutés avec lui, deux misérables de bas étage[1]. On délibère longtemps pour

    criminelle, t. I, ch. xi, nos 181-214 (Édit. 1866) ; — Fournier, Les officialités au moyen âge, p. 233 et suivantes.

  1. La procédure suivie dans les débats de Nantes est conforme aux règles de la procédure ecclésiastique alors en vigueur ; nous en reconnaissons facilement les traits, tels qu’ils nous sont tracés par M. A. Esmein (Histoire de la procédure criminelle en France, et spécialement de la procédure inquisitoriale depuis le xiiie siècle jusqu’à nos jours. Paris, in-8o, 1882.) « Les règles de cette procédure furent aisément fixées ; en réalité, ce n’était qu’une modification de l’ancienne poursuite, qui conduisait l’infamatus au serment purgatoire. (Concil. Later. (1215), C. 24, x, de Accus., v. i.) En premier lieu, il faut qu’il y ait une infamatio contre celui qu’on veut poursuivre « inquisitionem debet clamosa insinuatio prævenire » (C. 31, x, de Sim., v. i) ; et pour bien établir ce point, le juge commence par faire une enquête secrète, inquisitio famæ (cc., 19, 24, x, de Accus., v. i). Alors, l’inquisitus est cité et doit être présent. Avant tout, on lui communique les chefs d’accusation, capitula, sur lesquels porte l’inquisition ; on lui communique ensuite les noms des témoins entendus par le juge et le contenu des dispositions recueillies par écrit. L’inculpé pouvait présenter toutes les exceptions et les dépenses qu’il jugeait utiles de produire (cc. 21, 24, 26, x, de Accus., v. i).

    « Les textes n’indiquent pas que la procédure fut autrement secrète, et ils assurent, on le voit, la liberté de la défense. Cependant certains caractères révèlent une forme rigoureuse du procès : l’écriture joue un rôle prépondérant et le débat oral disparaît ; l’inquisitus doit prêter serment de dire la vérité lorsqu’il est interrogé sur les capitula (C. 17, 18, x, de Accus., v. i) ; enfin, il est assez vraisemblable que la torture était employée. » En note l’auteur ajoute : « Un seul texte, il est vrai, semble indiquer d’une façon précise l’emploi de la torture, C. 7, 10, de Reg. juris, v. 41 : Tormenta indiciis non præcedentibus inferenda non sunt). Quum in causæ contemplatione (et infra) in ipso causæ initio non est a quæstionibus inchoandum. » (Voy. Biéner, Beitrage, p. 55.) « L’usage de la question par les tourments, autrefois inconnu dans les tribunaux ecclésiastiques…, s’y est