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GILLES DE RAIS.

d’hommes respectables à tous égards, et les rapports des notaires assermentés, consignés sur les registres des visites épiscopales. L’enquête, signalée le 30 juillet précédent, s’est continuée sans relâche ; l’accusation s’est développée et étendue ; partout elle a été la même ; partout les mêmes crimes dénoncés, partout avec des larmes, au milieu d’une immense douleur ; — le procès va plus loin, et pour peindre par un mot énergique l’étendue et la violence des cris du peuple, il dit que les populations faisaient entendre des hurlements, ululantium[1] ! Le moment est venu d’exaucer ces cris suppliants et d’agir contre le coupable : « Voilà pourquoi, dit Jean de Malestroit, voilà pourquoi nous ne voulons pas cacher plus longtemps des choses aussi monstrueuses (ce qui prouve que les lettres du 30 juillet n’avaient pas été publiques), ni laisser se développer l’hérésie, qui, semblable à un cancer, dévore tout, s’il n’est promptement arraché jusque dans ses racines ; bien loin de là, nous voulons y apporter un remède aussi prompt qu’efficace. Aussi nous vous enjoignons, à tous et à chacun de vous en particulier, par ces présentes lettres, de citer immédiatement et d’une manière définitive, sans compter l’un sur l’autre, sans vous reposer de ce soin sur autrui, de citer devant nous ou devant l’official de notre église cathédrale, pour le lundi de la fête de l’Exaltation de la Vraie-Croix, 19 septembre, Gilles, plus haut désigné, noble baron de Rais, soumis à notre puissance et relevant de notre juridiction, et nous le citons nous-même par ces lettres à comparaître à notre barre pour avoir à répondre des crimes qui pèsent sur lui. Exécutez donc ces ordres, et que chacun de vous les fasse exécuter.

Donné à Nantes, le mardi 13 septembre, l’an du Seigneur 1440.

« Par mandement de l’évêque de Nantes,
« Jean Guiole. »
  1. Sur les termes qui qualifient la douleur populaire, v.Proc. ecclés.. — Acte d’accus., art. xv, p. xx