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VI


MAGIE. — ÉVOCATIONS.

Démons, évocations, magie : à ces mots, plus d’un lecteur sans doute se demande quelle fantasmagorie nous allons étaler devant ses yeux. Au risque peut-être de heurter de front bien des préjugés et d’exciter le rire des incrédules, l’auteur de cet ouvrage confesse qu’il tient pour réelles les scènes qu’il va décrire dans ce chapitre. Au XVIe siècle, le célèbre jurisconsulte Jean Bodin, d’Angers, dans son livre intitulé De la Démonologie ou le Fléau des Démons et des Sorciers », dédié à l’historien de Thou, pose une règle qui doit être, en ces matières, le fondement de toutes nos appréciations : « Je déduirai en son lieu, dit-il, la convenance et accord perpétuel d’histoires semblables des peuples divers et en divers siècles, rapportés aux actions des sorcières et à leurs confessions : il ne faut donc pas s’opiniâtrer contre la vérité, quand on voit les effets et qu’on ne connaît pas la cause[1]. » La saine critique se conforme à cette règle de raison, établie par un homme d’un grand bon sens. Si l’on refuse d’admettre une cause communément reconnue, parce qu’elle paraît contraire à la raison, au moins doit-on avouer les faits, et n’être pas assez déraisonnable pour les nier, sous le prétexte qu’ils sont inexpliqués ; les conséquences d’une pareille critique sont aussi évidentes que contraires au bon sens.

On peut discuter sur les causes ; mais les ténèbres dont

  1. Bodin, De la Démonologie, éd. 1570, préf. p. 9.