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SON INTERDICTION.

recevait en outre les terres de Princé, de Bourgneuf-en-Rais et de la Bénate, plus cent livres de rente sur Machecoul, avec la promesse d’une partie de l’île de Bouin, de Soché et des Jamonnières, etc. Nous avons, du 22 janvier 1438, trois contre-lettres du duc de Bretagne. Dans la première, il s’engage à restituer Champtocé à Gilles de Rais, dans le délai de trois ans ; déjà lui sont rendues les châtellenies de Bourgneuf, de la Bénate et plusieurs autres terres ; le duc se réserve toutefois mille livres de rente en échange des châtellenies de la Motte-Achard, de la Maurière et des Chênes. Dans la deuxième, le duc et son fils Pierre déclarent que, si le maréchal leur rend ces terres, le temps écoulé ne comptera nullement dans le délai accordé pour les retirer de leurs mains[1]. Dans la troisième enfin, Jean V accorde à Gilles de Rais la faculté de pouvoir, pendant les six années qui suivent, racheter pour la somme de cent mille écus d’or, les terres de Champtocé, d’Ingrandes, de Bourgneuf, de la Bénate et de Princé[2]. Gilles accepta cette clause le 20 mars suivant. Mais il ne faut pas s’y tromper ; le duc ne redoutait pas que Gilles pût se procurer la somme nécessaire pour rembourser ce qu’il avait déjà reçu sur le prix de vente, encore que le duc n’en eût payé qu’une très petite partie ; car il n’ignorait pas l’état de détresse où était réduit le maréchal. Mais Gilles s’accommodait de tout ; comme il avait six années devant lui, au point où il en était rendu alors dans son espoir de trouver le secret de faire de l’or, il ne doutait pas qu’il ne dût bientôt mettre la main sur ce moyen merveilleux et rentrer dans la possession de tous ses domaines. Avec de telles espérances et de telles illusions, il avait, en moins de huit ans, de 1431 ou 1432 à sa mort, en 1440, dévoré plus de deux cent mille écus de biens, c’est-à-dire des millions[3].

  1. Archives du département de la Loire-Inférieure, no 57, 750. Trésor des Chartes de Bret. Arm. 9, Cass. E, Inv. 39.
  2. V. D. Morice, t. 1, p. 529-530.
  3. Mémoire des Héritiers, fo 15 ro, 15 vo, 16 ro, 16 vo et suivants.