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SAINTS POPULAIRES.

La haine jalouse de Satan se réveilla avec plus de fureur que jamais ; elle suscita contre l’apôtre du Seigneur un certain préfet, nommé Licinius. Il y avait aussi deux mages, Cambyses et Zarès, qui, ayant été prêtres de la déesse Diane, se désespéraient de voir que le peuple avait abandonné le culte dont ils étaient les ministres. C’est pourquoi, ils fanatisèrent vingt de leurs disciples, et leur persuadèrent d’assassiner celui qu’ils regardaient comme un usurpateur de leur autorité. Taurin, voyant la troupe de ces assassins hypocrites s’avancer vers lui, fit sur eux le signe de la croix, et, en un instant, ils furent frappés d’immobilité. Cependant, à la voix du saint, ils retrouvèrent la liberté de leurs membres, et, convertis par un si étonnant miracle, ils supplièrent l’apôtre du Seigneur de purifier leurs âmes coupables dans les eaux sanctifiantes du baptême. Les mages tournèrent alors leur jalouse fureur contre eux-mêmes, et vengèrent leur homicide attentat en se poignardant.

Ce fut vers le même temps, que Licinius, importuné par la renommée du saint prélat, le fit appeler à sa maison de Gisai. Pendant le trajet, saint Taurin rencontra un paralytique accompagné de sa sœur qui était aveugle, sourde et muette ; il les guérit l’un et l’autre par une immersion d’eau sainte.

Licinius se hâta d’interroger Taurin en accompagnant ses questions d’insidieux encouragements de renoncer à la foi chrétienne. Non seulement notre apôtre rejeta les propositions du païen, mais, dans la discussion qui s’en suivit, il embarrassa Licinius avec tant d’adresse, dans les pièges de ses vieilles erreurs, que celui-ci ne put contenir un vif dépit. Il eut recours, pour répliquer, à la raison violente des persécuteurs, c’est-à-dire qu’il appela ses bourreaux, en leur commandant de dépouiller Taurin et de le fouetter de verges. Léonille, femme de Licinius, représenta alors à son mari qu’il avait un puissant motif de se montrer indulgent envers Taurin, puisqu’il venait de le reconnaître pour son parent. Le père du saint Vieillard était, en effet, le propre aïeul de Licinius. Loin