Page:Bosquet - La Normandie romanesque.djvu/376

Cette page a été validée par deux contributeurs.
343
LÉGENDES RELIGIEUSES.

saints, des victoires miraculeuses remportées sur des monstres et des dragons, et celle qui affirme, de plusieurs martyrs, qu’ils ont porté leur tête à la main, après le supplice de la décolation.

Il résulte de ces définitions que notre choix s’est étendu de préférence sur les légendes les moins orthodoxes, c’est-à-dire sur celles dont l’authenticité historique n’a pas été généralement admise par les écrivains religieux. Il nous a paru que nous nous conformions ainsi au but de ce recueil, qui est spécialement consacré à reproduire les croyances traditionnelles et populaires. Au reste, les récits miraculeux, que nous allons transcrire, quoique souvent extravagants quant aux faits, ne sauraient porter atteinte à la dignité de la Religion qui les avait adoptés, parce qu’ils ont toujours un caractère d’enseignement moral, parfaitement approprié à l’état et aux mœurs des peuplades à demi barbares auxquelles ils s’adressaient. Les leçons, qui se dégagent de ces inventions singulières, nous démontrent constamment la vanité de la force brutale, et de toutes ces passions égoïstes et matérielles qui sont tenues de céder, tôt ou tard, soit par entraînement, soit par contrainte, à l’ascendant divin de la sagesse et de la vertu. Qu’elle soit donc un fait avéré ou une tradition chimérique, la légende religieuse a conservé le caractère d’une parabole bienfaisante, fille bénie de la parabole évangélique, que le Seigneur allait racontant à ses disciples, pour leur apprendre à semer le grain de la parole dans les esprits, et à le faire fructifier dans les cœurs. Lors même qu’elle fut déchue de la sublime simplicité de sa forme primitive, la parabole sainte n’en continua pas moins d’exercer une action efficace sur les masses. Ses combinaisons merveilleuses défrayèrent l’imagination des pauvres de ce monde d’un trésor de rêveries pleines d’enchantements et de consolations, tandis que l’équité de ses préceptes et la vigueur de ses anathèmes devinrent l’unique sauvegarde des faibles et l’épouvantail des puissants. Cette influence civilisatrice des légendes religieuses