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SORCIERS, SORTILÈGES.

pour le peuple qui l’a intronisé, toutes les idées de secours et de délivrance. Ce saint bienfaisant rend la santé au malade chez qui les forces de la nature peuvent se prêter encore à opérer de salutaires effets, et il accorde, sur-le-champ, le repos éternel à ceux qui n’ont plus à attendre, sur la terre, que quelques jours ou quelques heures de vaines et cruelles souffrances[1].

Les pêcheurs de Dieppe ont coutume, en mer, de faire, chaque jour, la prière en commun ; mais ils procèdent à cet acte de dévotion par un cérémonial particulier, dont l’omission ne manquerait pas de leur attirer quelque grave malheur.

Un mousse parcourt d’abord le bateau, en répétant cette invitation :

À la prière,
Devant et arrière,
Depuis l’étrave jusqu’à l’étambord,
Réveille qui dort.

Le mousse descend ensuite, allume la chandelle du Bon Dieu, et s’écrie :

La chandelle du Bon Dieu est allumée,
Au saint nom de Dieu soit alizée,
Au profit du maître et de l’équipage,
Bon temps, bon vent, pour conduire la barque,
Si Dieu plaît.

Ensuite, un des plus vieux matelots de l’équipage, que l’on surnomme le Curé, dit à haute voix la prière, à laquelle succèdent, dimanches et fêtes, la messe et les vêpres, récitées de mémoire par le même matelot qui, souvent, ne sait pas lire. Lorsque la pêche du hareng est terminée, c’est-à-dire à la fin de la dernière course, et au moment d’entrer

  1. C.-A. Deshayes, Hist. de Jumiéges, p. 254 et 255.