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LOUPS-GAROUS.

ticulières au moyen-âge ; l’antiquité en présente aussi des exemples nombreux. Saint Augustin[1] cite Varron, qui raconte qu’un nommé Déménétius, ayant goûté d’un sacrifice que les Arcadiens avaient coutume d’offrir à Jupiter-Lyceus, fut changé en loup, et, dix ans après, recouvra sa première forme. Pline cite également Evanthès, auteur grec, qui raconte aussi que, en Arcadie, les descendants d’un nommé Autacus, en passant à travers certain fleuve, se trouvaient aussitôt changés en loups, et, quelque temps après, repassant par le même fleuve, reprenaient leur figure naturelle[2].

On trouve aussi, dans plusieurs médecins grecs, et entre autres dans Marcellus de Sida, qui vivait sous Adrien et Antonin, la description de la lycanthropie[3]. L’Edda fait également mention d’hommes transformés par les mauvais esprits en loups ou en chiens. Toutes les croyances relatives à ce sujet se renouvelèrent pendant le moyen-âge. La plupart des démonographes du xvie siècle n’admettaient pas même le doute sur la réalité de la transformation des hommes en animaux, opérée par puissance magique. Ils référaient leur opinion au témoignage de l’antiquité ; mais leur critique, plus pressante que judicieuse, ne se contentait pas des affirmations qu’elle pouvait présenter en preuve ; pour grossir le faisceau de ses démonstrations victorieuses, elle argumentait sur les plus fausses interprétations. Nabuchodonosor changé en bœuf, et Lycaon en loup, les compagnons d’Ulysse transformés en pourceaux, Lucien et Apulée métamorphosés en ânes, étaient considérés comme des exemples irréfragables de la possibilité du fait des transformations humaines. La métempsycose de Pythagore aidait à en systématiser la croyance. Enfin, le mi-

  1. Cité de Dieu, liv. xviii, c. 17.
  2. Cl. Prieur, Dialogue de la Lycanthropie ; Louvain, 1596, p. 36 et suiv.
  3. Littré, Hist. des grandes Épidémies (Revue des Deux-Mondes ; 15 janvier 1836.)