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CHAPITRE XII.

de la foi. Cependant, le principal enseignement de l’homme, c’est celui de ses fautes et de ses erreurs, dont le principe est toujours persistant au sein des imperfections inhérentes à notre nature. Ainsi, le siècle actuel, malgré l’orgueil de ses lumières, aurait tort de prétendre qu’il n’a rien à démêler avec les aberrations grossières des siècles, ses prédécesseurs. Notre civilisation est souvent trop prompte à se voter des actions de grâces, et à se glorifier de ses propres triomphes. Depuis que les lycanthropes ne dévorent plus les petits enfants, faut-il croire, par exemple, que toutes les maladies farouches de l’imagination soient radicalement guéries, et que le délire du crime ait cessé d’engendrer des effets monstrueux ? Non ; il est bon, au contraire, de donner au précepte évangélique toute l’étendue de son application. S’il est vrai que nous ayons constaté une poutre dans l’œil du prochain, cela ne saurait nous empêcher de vérifier la paille qui est dans le nôtre ; et, pour que le but philosophique de la tradition se trouve rempli, il ne faut pas que les formes barbares du passé nous dérobent les analogies morales que celui-ci conserve avec le présent.

Puisse le lecteur abonder dans le sens intime de ces réflexions ! Et puisse surtout ce retour sur lui-même susciter dans son esprit quelque disposition tolérante qui lui permette de supporter les répugnantes absurdités dont notre sujet nous condamne à l’entretenir !

Les croyances relatives à la lycanthropie ne sont point par-

    en Angleterre, dit-il, sous l’influence de certaines lunaisons, des hommes transformés en loups, espèce d’hommes que les Français appellent Garous (Gerulphos), et les Anglais Were-wolf ; or, Were, en anglais, signifie homme, et Wolf, loup. » Marie de France, dans le Lai de Bisclavaret, nous apprend que le mot primitivement employé en Normandie était celui de Garvall, dans lequel on peut, à la rigueur, retrouver l’origine directe du mot de Garou. Mais, s’il est vrai que Garou, Garwall, et leur forme latinisée Gerulphus, ne sont que des contractions de Were-wolf, qui signifie Homme-loup, on voit que l’usage nous fait commettre un singulier pléonasme, en associant le mot loup au mot garou, qui veut déjà dire homme-loup.