Page:Bornier - Agamemnon, 1868.djvu/31

Cette page n’a pas encore été corrigée
20
AGAMEMNON.

EURYBATE.
Leurs cheveux épais, leurs voix plaintives,
Te le disent : ce sont les Troyennes captives ;
Cassandre les conduit.

CLYTEMNESTRE.
Ah ! c’est elle ?… (A part.) Eh bien, non,
Je ne fléchirai pas : Égyslhe avait raison !
(Clytemneslre sort, suivie d’Eurybate.)

SCÈNE II
CASSANDRE, LE CHŒUR DES TROYENNES.
LE CHŒUR DES TROYENNES.

I
D’où vient que l’homme, hélas ! aime cette souffrance
Qu’on appelle la vie, amer présent du sort,
Tandis qu’il peut toujours trouver la délivrance
Et se réfugier dans les bras de la mort ?
O calme du tombeau ! profond et sûr asile !
Rien n’en peut plus troubler la majesté tranquille,
Ni les coups du destin,.ni la guerre civile,
Ni les cris du vainqueur et son joug odieux,
Ni les peuples tremblants offerts en hécatombe ;
L’homme hardi qui s’ouvre à soi-même la tombe
Devient, libre dès qu’il y tombe,
Égal aux rois, égal aux dieux !

II
Ne pas savoir mourir, c’est le malheur suprême !
Nous avons vu la flamme engloutir Ilion ;
Vainqueurs par un nocturne et honteux stratagème,
Les chasseurs dans son antçe ont surpris le lion.
Aujourd’hui tout l’aspect de cette horrible histoire
Sur la terre d’exil revient à ma mémoire :
Je revois notre Hector trahi par la victoire,
Et la chute du temple et celle du rempart ;
Ah ! d’un malheur plus grand le souvenir me touche :
Je vois Priam saisi par le vainqueur farouche,
Et Pyrrhus, l’injure à la bouche,
Égorgeant le pâle vieillard !