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en effet, car sa maman lui achetait tout ce qu’elle désirait. Hélas ! elle n’avait pu lui acheter la santé, et, malgré les remèdes pris chez le pharmacien, malgré le vieux médecin que l’on payait très cher, la petite fille était morte.

Une heure avant de mourir, elle avait demandé un petit dé d’or, en or vrai, avait-elle insisté.

La mère Gudule était sortie en courant pour aller chez le bijoutier, elle avait marchandé des dés en or : c’était très cher.

L’idée lui était venue d’en acheter un en cuivre ; cela donnerait à la petite malade l’illusion de l’or et ne coûterait presque rien. Mais la tromper au moment de sa mort ! ne pas satisfaire son dernier désir ! la mère Gudule ne le pouvait pas.

Elle acheta le dé ; c’était une folie. La joie de l’enfant lui fit oublier sa folie, et la petite mourut contente.

Il n’y avait pas d’argent pour payer l’enterrement ; une amie de la mère Gudule lui suggéra l’idée de vendre au bijoutier le dé qui n’avait pas servi ; mais elle avait repoussé la pensée de se séparer de ce qui avait causé une dernière joie à sa fille. Elle travaillerait, mais elle garderait le dé.

À travers les années, en cherchant à terre ce petit dé qui ne l’avait jamais quittée et qui était perdu, elle pleurait, et la petite, qui trouvait l’histoire bien triste, aurait donné beaucoup pour la voir se terminer par un sourire de la vieille à l’objet retrouvé.

Le jour baissait, et les allumeurs de réverbères couraient déjà par les rues avec leurs grand bâtons, au haut desquels vacillait une petite flamme rouge.

Comme l’un d’eux s’arrêtait pour allumer le bec de gaz qui se trouvait au coin de la brasserie, au moment où la mère Gudule et la petite fille se trouvaient juste sous le réverbère, l’enfant vit scintiller