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Tous les jours, muni du coussin qui, pour ouvrir la porte, me servait de piédestal, je montais à la chambre verte ; mais bien des fois j’en revins désappointé ; la réponse du bon Dieu ne venait pas ; un jour même je crus tout perdu, et je faillis pousser un cri de désespoir en m’apercevant que le berceau n’était plus dans la chambre.

Comme je redescendais tout triste l’escalier, j’entendis mon père m’appeler.

— Max, mon petit Max, viens vite embrasser le petit frère que le bon Dieu t’envoie.

Et me prenant dans ses bras, il me porta dans la chambre de ma mère, où était maintenant le berceau.

Mais moi, devant le bébé qui reposait sous les rideaux blancs, je n’eus qu’une parole :

— Le bon Dieu n’a donc pas reçu ma lettre ? C’était une petite sœur que je lui avais demandée.

Je me trahissais : car cet aveu exigeait des éclaircissements que je donnai d’ailleurs avec ingénuité.

En raison sans doute de ma franchise, on ne me gronda pas ; mais je restai si persuadé que c’était pour me punir de ma désobéissance que le bon Dieu n’avait pas répondu à mon désir d’avoir une petite sœur, que pendant longtemps je m’approchai peu du berceau qui contenait la preuve vivante du mécontentement du ciel. Peu à peu cependant je compris que je ne devais pas tenir à mon petit frère une rigueur par trop grande ; en somme, il n’était pas responsable de ce qui s’était passé entre le bon Dieu et moi. Madeleine d’ailleurs, très vite consolée parce qu’elle n’avait pas mes remords, me reprochait mon indifférence et m’assurait que, pour un garçon, Raymond était vraiment très gentil.

Je condescendis alors à le regarder, et, les années aidant, nous